Interview de ROMAIN FROBERT, président et fondateur d’Ovatio, société de gestion de risques spécialisée sur le marché des industries culturelles et créatives.

 

Bonjour Romain. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre métier?

En Europe, nous disposons d’un vivier d’entrepreneurs capables de prendre des risques pour repousser les limites de la création et délivrer des productions de qualité. Ma mission est de leur apporter les conditions de sécurité optimales pour leur permettre d’organiser de formidables projets culturels ou promotionnels, avec quelques fois une concentration de spectateurs / visiteurs hors norme et des moyens techniques extraordinaires. On parle d’enjeux gigantesques (les Jeux Olympiques par exemple).

Toute perturbation d’ordre humain (malveillance, manifestation, …), technologique (accidents lors de l’adaptation/déplacement des tribunes en fonction de la manifestation) ou naturel (météorologie défavorable, tremblement de terre, …) peut entraîner des conséquences insupportables. La survenance d’un incident ou d’un accident est toujours une période de crise. C’est un moment durant lequel un stress apparaît toujours.

Mon rôle est donc d’être présent en cas de problème pour que le projet ait lieu à date fixe, dans un lieu et avec un budget déterminé. En quelque sorte, j’ai pour mission de faire en sorte que tout cet écosystème fonctionne correctement.

Quelque part, faire en sorte qu’Ovatio soit « l’ange gardien » du secteur culturel, le protecteur de l’exception culturelle française en veillant à la fois, à la sécurité, mais aussi à la prospérité du monde du divertissement et des médias. Derrière Ovatio, c’est 17 ans de savoir-faire très technique et pluridisciplinaire avec du juridique, du conseil, de la météorologie, voir de la psychologie.

Bref, vous l’aurez compris, Ovatio travaille pour ses clients et non pour commercialiser les produits des compagnies d’assurance ! C’est dans ce contexte et cet état d’esprit que j’ai décidé de créer Ovatio. Le marché est en train de radicalement changer et c’est plein de perspectives extraordinaires pour Ovatio.

Vous me parliez de dynamiser/bousculer ce vieux métier, c’est-à-dire?

Dès la création de la société, j’ai en effet souhaité afficher une posture plus dynamique, agile, avec une structure disponible et une hiérarchie légère, plus active, et une vision moderne de mon métier : le rendre séduisant alors qu’il est poussiéreux.

Quel est l’impact de l’actualité sur votre activité?

La menace d’attentats après les tragédies de Charlie Hebdo, du Bataclan, de Nice … Le printemps marqué par les manifestations sur la loi travail, les inondations, la météo exécrable mais aussi la mauvaise conjoncture que traverse l’économie française qui a affecté certains sous-traitants et prestataires ont conduit de nombreux organisateurs/producteurs à reporter, voir annuler leurs manifestations/productions. Le mauvais règlement d’un sinistre peut conduire à un préjudice économique insupportable pour votre entreprise.

« Bien qu’un contrat paraisse parfait sur le papier, c’est davantage sur l’accompagnement du sinistre qu’il faut choisir son intermédiaire. »

 

Quelle que soit la relation avec votre intermédiaire et/ou assureur, vous constaterez autant que moi qu’un contrat d’assurance ne repose que sur une promesse que les assureurs ont de plus en plus de mal à honorer. Bien qu’un contrat paraisse parfait sur le papier, c’est bien sur l¹accompagnement du sinistre qu’il faut choisir son intermédiaire et Ovatio vous donne les moyens d’agir en vous accompagnant sur la phase d’indemnisation du sinistre.

C’est avec cette philosophie et en qualité de conseil et gestionnaire de risques atypiques et éphémères, plutôt que simple courtier d’assurance, que la société OVATIO s’est entièrement consacrée au marché des industries culturelles : TV/cinéma/sport/fine-arts/musique/spectacle vivant (retrouvez l’article du parisien à ce sujet). Lien vers l’article

Quelle est votre stratégie compte tenu de l’accélération de l’industrialisation du secteur et de l’accompagnement de vos clients à l’international?

Ce n’est un secret pour personne, depuis 2008, nos clients, les compagnies d’assurances, les intermédiaires font face à des défis sans précédent.

L’effet de taille est devenu crucial, il détermine notre capacité à investir. C’est pourquoi, en très peu de temps, le marché s’est concentré avec la présence de véritables multinationales de l’entertainment (Entertainment never ends). Lien vers le manifeste

Tout ceci a nécessité d’avoir l’organisation et les équipes (dont la majorité viennent du marché anglais) pour accompagner nos principaux clients à l’international. Nous avons commencé par recruter un courtier qui a exercé 14 ans sur le marché Italien à Milan et nous sommes en train d’ouvrir un bureau à Londres avec un expert en risques spéciaux.

Est-ce que votre groupe est indépendant?

Ovatio revendique plus que jamais son indépendance. Nous n’avons de compte à rendre qu’à nos clients !

C’est évidemment une vraie force de ne pas dépendre d’un actionnaire, de ses reportings et réflexions à court terme. Cela nous permet de nous concentrer sur nos clients, de savoir prendre des risques, de rester sur des circuits de décision courts quand notre stratégie porte, elle, sur le long terme. L’humain est aussi au cœur de notre stratégie.

Quelle est votre vision du marché du courtage d’assurance des industries du spectacle vivant et de l’audiovisuel aujourd’hui?

L’univers de nos clients est en constante mutation, ce qui les éloigne progressivement du courtage « traditionnel ». L’effondrement des primes actuel engendre une situation d’étranglement sur la prise en charge des sinistres d’intensité par les assureurs mais aussi, mécaniquement, une diminution des commissions, souvent seule source de revenu pour les courtiers. Face aux attentes particulières de nos clients spécialistes du divertissement et de la communication, notre souhaitons leur apporter conseil et services à forte valeur ajoutée avec des offres d’assurance à coûts optimisés.

« L’industrie du divertissement et des médias au sens large s’éloigne du courtage traditionnel. »

 

Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire pour vous?

Nous intervenons sur un marché particulier mais conséquent puisque les industries culturelles et créatives constituent le troisième employeur européen. Etant détenteurs d’une expérience sinistre unique et de premier plan, nous devons évoluer vers la gestion de risques et remettre l’assurance au centre des préoccupations de nos clients, particulièrement exposés à des risques d’intensité (météo, attentat, épidémie…). Le poids des sinistres a un impact direct sur le maintien d’un assureur sur notre marché.

Ce choix de la spécialisation associé à une logique du mutualisation des expositions aux risques nous ont permis de gérer plus de 19 M€ de primes d’assurance en 2016, en maintenant des résultats viables malgré des situations de cumuls successives comme la très mauvaise saison météo en 2014 ou bien les conséquences des attentats en 2015 et 2016.

Votre stratégie passe-t-elle par des opérations de croissance externe?

Le moteur du développement d’Ovatio reste la croissance organique. Notre modèle économique et notre parti-pris ont porté leurs fruits après une croissance annuelle ininterrompue de l’ordre de 15 % depuis huit ans, avec plus de 3 000 clients conseillés. En matière de croissance externe, nous voulons capter un transfert de compétences plus qu’un apport de volume. Nos opérations de rachat reposeront systématiquement sur des structures détentrices d’un réel savoir-faire métier nécessaire à un management complet et sur mesure des assurances pour les industries culturelles et créatives.